Comprendre les cancers les plus fréquents chez l’enfant : repères essentiels pour les familles

11 octobre 2025

Pourquoi parler des cancers de l’enfant ?

En France, chaque année, près de 2500 enfants et adolescents apprennent qu’ils sont atteints d’un cancer (Institut National du Cancer — INCa). Derrière ce chiffre, il y a l’épreuve inattendue de familles, des parcours de soins parfois longs et de nombreuses questions : quels types de cancers touchent le plus souvent les enfants ? Sont-ils différents de ceux de l’adulte ? Quels signes doivent alerter ?

Aborder ces questions permet non seulement d’informer, mais aussi de mieux accompagner les familles concernées et de briser l’isolement que suscitent encore aujourd’hui les cancers pédiatriques, un sujet qui reste tabou ou méconnu.

Les particularités des cancers de l’enfant

Contrairement à la population adulte, où les cancers sont principalement liés à l’âge, à l’environnement ou à certains modes de vie, les cancers chez l’enfant apparaissent malgré l’absence de facteurs de risque identifiables dans la majorité des cas. Ils se développent souvent rapidement, mais sont généralement différents de ceux que l’on rencontre chez l’adulte : il s’agit rarement de cancers “liés à la vieillesse” ou influencés par le tabac ou l’alcool.

  • Enfants et adolescents représentent environ 1 à 2 % de l’ensemble des cancers.
  • Près de 80% des enfants atteints de cancer guérissent aujourd’hui, reflet d’une prise en charge adaptée et de progrès majeurs réalisés depuis 50 ans.

Pour bien comprendre, il faut savoir qu’on classe généralement les cancers de l’enfant dans trois grands groupes : les leucémies, les tumeurs du système nerveux central (cerveau et moelle épinière), et les lymphomes. D’autres types existent, mais ceux-ci sont les plus fréquents.

Classement des cancers pédiatriques les plus fréquents

Voici la répartition selon les données de l’INCa, du Registre national des cancers de l’enfant (RNCE) et de Cancer Research UK (données comparables en Europe) :

Type de cancer Part estimée Âge moyen d’apparition
Leucémies ~30 % 3-5 ans
Tumeurs cérébrales ~25 % Variable
Lymphomes ~13 % Adolescence principalement
Néphroblastome, Neuroblastome, Sarcomes ~20 % Enfant jeune pour la plupart

1. Les leucémies

Les leucémies sont les cancers les plus fréquents chez l’enfant. Elles touchent principalement la moelle osseuse et le sang : des cellules immatures s’y multiplient de façon incontrôlée, empêchant le bon fonctionnement normal de la moelle.

  • Leucémie aiguë lymphoblastique (LAL) : c’est la plus fréquente (environ 80% des leucémies pédiatriques). Elle concerne surtout les enfants entre 2 et 5 ans.
  • Leucémie aiguë myéloblastique (LAM) : plus rare chez l’enfant (~15-20%), elle survient à tout âge.

fatigue persistante, pâleur importante, infections répétées, bleus ou saignements sans raison évidente, douleurs osseuses.

2. Les tumeurs cérébrales et médullaires

Les tumeurs du système nerveux central (cerveau, cervelet, moelle) constituent la deuxième grande famille de cancers chez l’enfant.

  • 30 à 50 % des tumeurs de l’enfant sont cérébrales.
  • Les formes les plus fréquentes sont : , , .

maux de tête persistants, vomissements non expliqués, troubles de l’équilibre ou de la vue, troubles du comportement, difficultés scolaires d’apparition soudaine.

3. Les lymphomes

Les lymphomes regroupent deux familles principales, qui touchent le système lymphatique : le lymphome de Hodgkin (environ 6% des cancers de l’enfant) et les lymphomes non-hodgkiniens (environ 7%). Ils sont plus souvent observés chez l’adolescent.

  • augmentation de la taille des ganglions (surtout au niveau du cou), sueurs nocturnes, perte de poids, fièvre persistante.

4. D’autres tumeurs solides remarquables

  • troisième cancer solide pédiatrique, il touche principalement les enfants de moins de 5 ans. Il se développe à partir des cellules du système nerveux sympathique (souvent près des surrénales au-dessus des reins).
  • (ou tumeur de Wilms) : tumeur du rein qui apparaît presque exclusivement chez l’enfant entre 2 et 5 ans.
  • (essentiellement les ) : ils prennent naissance dans les muscles, les tissus conjonctifs ou les os.
  • ce cancer de la rétine touche principalement les bébés et les jeunes enfants.
  • deux tumeurs osseuses plus fréquentes chez l’adolescent, notamment autour de la période de la croissance pubertaire.

Des chiffres clés pour comprendre

  • Environ 2500 nouveaux cas de cancers chez les moins de 18 ans chaque année en France (INCa).
  • 8 enfants sur 10 guérissent aujourd’hui d’un cancer infantile (Gustave Roussy, lien).
  • La leucémie aiguë lymphoblastique seule représente près de 450 nouveaux cas par an.
  • La part des cancers diagnostiqués avant 5 ans est d’environ 40 % (données RNCE).

Le taux de guérison a fortement progressé en cinquante ans : dans les années 1970, moins de la moitié des enfants survivaient à la maladie.

Quels signes doivent amener à consulter chez l’enfant ?

Le cancer de l’enfant reste une maladie rare. Néanmoins, certains signes doivent inciter à consulter :

  • Fatigue inhabituelle, qui dure sans raison apparente
  • Pâleur ou hématomes fréquents
  • Fièvre prolongée ou infections répétées
  • Maux de tête persistants, troubles visuels, vomissements non expliqués
  • Douleurs osseuses ou articulaires
  • Modification du comportement
  • Gonflement persistant à un endroit du corps (ventre, ganglions…)

La plupart du temps, ces signes ont des causes bénignes – mais s’ils persistent, il est important de les signaler à un médecin afin de dépister au plus tôt d’éventuelles pathologies.

Les facteurs de risque et la prévention : état des connaissances

La plupart des cancers pédiatriques ne sont pas liés à un facteur de risque identifiable. Seuls quelques cas très rares sont associés à des maladies génétiques héréditaires (par exemple, les enfants avec un syndrome de Li-Fraumeni ont un risque accru de développer certains cancers rares).

  • Les facteurs environnementaux (pollution, exposition aux radiations, pesticides) font l’objet de recherches accrues mais n’expliquent qu’une très faible part des cancers pédiatriques à ce jour (INSERM).
  • Il n’existe aujourd’hui aucun moyen de prévention clairement établi contre la majorité des cancers de l’enfant.

Les campagnes de dépistage systématique n’ont pas de justification dans la population générale pédiatrique. Les progrès passent avant tout par la recherche et l’innovation thérapeutique, avec l’accent sur le diagnostic précoce.

Mieux vivre le parcours de soin : ressources et accompagnement

Face au diagnostic d’un cancer pédiatrique, les familles se retrouvent souvent plongées dans l’inconnu. Les hôpitaux spécialisés, comme à Caen ou à Rouen, disposent d’équipes pluridisciplinaires regroupant médecins, infirmiers, psychologues, éducateurs et associations, pour soutenir enfants et proches tout au long de la maladie.

  • L’Association Imagine for Margo soutient la recherche et l’accompagnement.
  • La Fédération Enfants et Santé propose aide et information aux familles.
  • La Ligue contre le cancer, antenne de la Manche, offre également accompagnement psychologique et ateliers de soutien pour les fratries.
  • Des dispositifs nationaux, comme l’accompagnement scolaire à l’hôpital et à domicile, permettent à l’enfant de poursuivre ses apprentissages sans rupture majeure.

Même après la guérison, le suivi médical à long terme est primordial : certains effets secondaires des traitements (comme la chimiothérapie ou la radiothérapie) peuvent apparaître plusieurs années après la fin de la maladie. Les équipes du réseau OncoNormandie (dont fait partie le CH de Cherbourg) assurent ce suivi de proximité avec le service référent.

Espoirs et avancées : une dynamique sans cesse renouvelée

Les cancers de l’enfant, bien que rares, continuent de mobiliser chercheurs et soignants pour mettre au point de nouveaux traitements. L’immunothérapie, la médecine personnalisée et l’innovation dans le soutien psychosocial font aujourd’hui partie intégrante de la prise en charge. Les taux de survie, en permanente amélioration, donnent des raisons d’espérer : dans la grande majorité des cas, les enfants grandissent, retournent à l’école et poursuivent leurs projets.

S’informer, partager, et solliciter le soutien des structures d’accompagnement sont autant de repères qui permettent de ne pas affronter seul la maladie. La solidarité locale, les progrès médicaux, et l’expertise des équipes contribuent chaque jour à améliorer la vie des enfants et de leurs familles, dans la Manche et partout en France.

Sources principales : Institut National du Cancer, Registre national des cancers de l’enfant, Inserm, Gustave Roussy, Cancer Research UK.